Dom Juan 2.0
Il a les travers de son époque. Le Dom Juan de Vincent Macaigne est plaintif, sombre, et se défie de tout. Ce film « met en cinéma le texte de Molière avec la troupe de la Comédie Française », explique le réalisateur Vincent Macaigne. Une adaptation moderne, donc, qui avait pour seule contrainte de n'utiliser que le texte de la pièce originale. C'est Loïc Corbery qui prend la peau de Dom Juan, et Serge Bagdassarian celle de Sganarelle.
Le film a été tourné en 13 jours, avec des acteurs de théâtre qui jouaient la même pièce le soir-même sur les planches. Un véritable défi. Le film mélange les genres, par son essence même : un texte de théâtre mis en film, avec des comédiens de théâtre. À cela s'ajoute l'omniprésence sonore de l'opéra Don Giovanni de Mozart.
« Une œuvre puissante »
L'histoire est connue : celle des derniers jours de Dom Juan, qui n'aura de cesse de malmener le ciel et les femmes jusqu'à sa toute fin. L'adaptation moderne dépoussière le classique des planches : scènes d'orgie, virée en limousine, tatouages au marqueur, hôpital psychiatrique et kebab frites...le Dom Juan de Macaigne colle à l'époque. Et lorsqu'il martèle cette fameuse réplique à son père (un vieux militaire à képi) et à Sganarelle, « l'hypocrisie est un vice à la mode, et tous les vices à la mode passent pour vertus », l'adaptation prend tout son sens. Encore en 2015, Dom Juan est d'actualité. Les auteurs meurent, mais les vices et les tourments décrits dans leurs œuvres restent les mêmes. « Dom Juan est une œuvre puissante », constate Vincent Macaigne. « Les grands auteurs ont toujours des choses à dire aux autres, avec vivacité et intelligence. J'ai voulu faire mon adaptation, à partir de ce texte. »
Une appropriation de l'oeuvre, d'où le changement de titre et les coupes dans le texte pour faire redécouvrir le personnage au public. « Par exemple, au montage, on s'est rendu compte que le fil conducteur était la relation entre Dom Juan et Sganarelle, bloqués l'un avec l'autre jusqu'à la fin, entre amour et haine », ajoute le réalisateur. Le duo entraînera le spectateur jusqu'à l'expiration finale. Cruauté, langueur et provocation. Voilà ce qui se dégage de ce Dom Juan.
Marie Jousseaume

Loïc Corbery (Dom Juan) et Serge Bagdassarian (Sganarelle). © FIF 85